Au cours du mois de septembre 2023, deux référés ont été introduits près du Conseil d’Etat à l’encontre de la note de service du Ministre de l’Education relative au respect des valeurs de la République à l’école. De tels recours s’avèrent recevables par le juge administratif lorsqu’ils sont mis en œuvre à l’encontre d’une note de service qui contient des dispositions impératives (CE, 13 octobre 2008, req. n° 312088). Il s’avère que la note de service du Ministre de l’Education ne se contente point de rappeler la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics, dès lors qu’elle adresse aux personnels des dispositions impératives qu’ils doivent mettre en œuvre.
Selon l’article L. 111-1 du code de l’éducation, la laïcité est un principe fondamental du droit de l’éducation, qui existe depuis la IIIème République, et qui constitue l’une des valeurs fondamentales de notre République.
Depuis 1989, le Conseil d’Etat a toujours soutenu que le port de signes d’appartenance religieuse, relevant de la liberté d’expression, n’est pas incompatible avec le principe de laïcité lorsque ce port ne constitue pas un acte de prosélytisme entravant la laïcité de toute institution scolaire (CE, 27 novembre 1989, avis n° 346893).
Après une succession de décisions jurisprudentielles portant une appréciation au cas par cas du caractère ostentatoire ou revendicatif du port d’un signe religieux (CE 2 nov. 1992, Kherouaa et a, req. n° 130394 ; CE 14 mars 1994, Mlle Ylmaz, req. n° 145656 ; CE 10 mars 1995, Aoukili, req. n° 159981 ; CE 20 oct. 1999, MEN c /Aït Ahmad, req. n° 181486), et des circulaires ministérielles s’appuyant sur cette jurisprudence, la loi de 2004 précitée a introduit l’article L. 141-5-1 au sein du code de l’éducation qui consacre explicitement l’interdiction du port ostentatoire de signes religieux en milieu scolaire.
Comme la circulaire du 18 mai 2004 ( NOR : MENG0401138C) d’application de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004, désignant comme signes ostentatoires « le voile islamique, quel que soit le nom qu’on lui donne, la kippa ou une croix excessive », la note de service du Ministre de l’Education du 31 août 2023 attribue la qualification de signes ostentatoires aux abayas (robes amples) et aux qamis (tuniques longues) au regard des dispositions de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation.
Le Conseil d’Etat a rejeté les recours contentieux introduits à l’encontre de cette note de service du Ministre de l’éducation, en considérant que les interdictions de tenues vestimentaires qu’elle impose ne portent pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale (CE, référé-liberté, 7 sept. 2023, req. n° 487891) et qu’il n’existe pas non plus de doute sérieux sur la légalité de cette interdiction (CE, référé-suspension, 25 sept. 2023, req. n° 487896 et 487975).
Ensuite, il peut être utile de souligner que l’article R. 421-10 du code de l’éducation a été modifié par le décret n° 2023-782 du 16 août 2023 afin qu’une procédure disciplinaire soit systématiquement engagée par le chef d’établissement « lorsque l’élève commet un acte portant une atteinte grave aux principes de la République, notamment au principe de laïcité ». A cet égard, la note de service du 31 août 2023 précise, concernant le port de l’abaya ou du qamis que « le fait de persister dans un comportement contraire à la loi du 15 mars 2004 ou de réitérer un tel comportement entre pleinement dans cette catégorie et doit donc être sanctionné disciplinairement » après l’engagement d’un dialogue.
Enfin, rappelons que l’article L. 141-5-2 du code de l’éducation a été introduit par l'article 10 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance en ayant pour objectif de protéger la liberté de conscience des élèves en réprimant les pressions et tentatives d'endoctrinement et en faisant acquérir à tous les élèves le respect.
A.K.